lundi 31 août 2009

Interview d'Emile Bravo chez Dargaud.... Avril 2002

Interview du mois d'Avril 2002
Début juin, après sa prépublication dans le magazine Okapi, le tome 3 des Épatantes aventures de Jules - Presque enterrés - sera en librairie. Comme tous les albums d’Émile Bravo, il s’agit d’un travail remarquable de précision, d’intelligence et d’humour ; enchanteur pour les plus jeunes comme pour les adultes. À bâtons rompus, nous avons cherché à en savoir un peu plus sur son auteur, le non moins épatant Émile Bravo, récent lauréat du prix René Goscinny du meilleur scénariste.

Votre biographie, diffusée par le service de presse Dargaud, est d’une extrême pudeur… Juste deux, trois pirouettes et quatre titres d’albums avant d’en venir à Jules… C’est une… dérobade due à quoi ?

Mais pas du tout ! Dargaud possède une fiche des renseignements généraux me concernant mais l’attachée de presse a dû l’égarer, aussi se contente-t-elle de diffuser un poème autobiographique que je lui avais envoyé pour la séduire…

Si on insiste ? Vous racontez quoi ?
Ha, ha, ha ! Vous autres, les journalistes, vous êtes impayables ! Toujours en quête de potins… Eh bien, soit ! Je vais vous faire un aveu : elle m’a éconduit comme un malpropre, oui…

Vos trois albums, Biélo, Kino, Tamo étaient remarquables. Vous pouvez nous en parler un peu ?
Merci, je suis touché par le compliment. Aleksis Strogonov était un jeune personnage idéaliste et naïf qui, au fil du temps et des expériences, devait sombrer dans un pessimisme obscur puis dans le désespoir… Mais Dargaud l’a devancé à ce sujet.

Et votre scénariste, Jean Régnaud, qu’est-il devenu ?
Mon ami, Jean Régnaud, lui, a choisi l’Aventure. Le jour, il est grand reporter à la Caisse d’épargne. La nuit, il gère deux gargotes parisiennes mal fréquentées ; l’une : Le Robinet Mélangeur est un lieu de débauche, plaque tournante de la drogue, l’autre : La Cantine du Batofar installée dans un vieux rafiot, sur la Seine, est une couverture qui cache un important trafic d’armes… “Ça rapporte bien plus que de faire du Mickey, crois-moi !” me lance-t-il !

Aleksis Strogonov n’a pas fonctionné auprès du public. Qu’avez-vous ressenti ?
Beaucoup de désarroi ! C’était incompréhensible ! Nous avions créé ce personnage après une étude de marché : c’était Tintin avec la casquette de Corto Maltèse, deux grands succès ! Ça ne pouvait que marcher ! Et les histoires ? Fantastiques ! Nous les écrivions pour nous. Nous aurions dû fatalement trouver un public qui nous ressemble !… Bien plus tard, nous avons constaté que nous n’achetions jamais de bandes dessinées.

Pouvez-vous - quand même ! - nous dire comment vous avez débuté, quel parcours, quelles influences, en BD et en d’autres domaines ?
Woooouuuuh ! Il nous faudrait des pages ! Disons que j’ai commencé sur les marges des albums de Tintin (je n’ai jamais été bien matérialiste…). Puis sur celles de mes cahiers… Non, attendez, tout ceci est d’une banalité ! J’ai une meilleure anecdote : mon livret de famille est couvert de dessins ! Précoce, n’est-ce pas ? Et puis, un jour, ma mère, qui, elle, est très matérialiste, a fini par m’acheter du papier. Alors, je me suis mis à dessiner des histoires pour mon père (il se donnait assez de mal, le soir, à m’en conter pour m’endormir… Je lui devais bien ça). Puis, l’école, le lycée… Où je distrayais mes camarades avec de petites aventures (remarquez comme je mets l’accent sur l’histoire bien plus que sur le dessin qui n’est qu’un vecteur… Vous me suivez ?) Un jour, un ami me dit : “Émile, plus tard, tu passeras dans l’émission de Patrick Sabatier, Avis de recherche, et on se retrouvera et on rigolera bien !” Ce fut une révélation, je me découvrais ambitieux ! Alors que je m’orientais vers une absurde carrière d’ingénieur (moi, qui n’ai jamais su faire la différence entre un écrou de 10 et une vis de 5 !) je pris un virage à 180 degrés pour devenir “ARTISTE” !!! Comme je n’avais que très peu de notion de beaux arts je me lançais dans la bande dessinée… Attention : n’allez pas croire que je dénigre le milieu . C’est après avoir lu Pratt (Hugo) que j’ai pris ma décision : ce type semblait avoir vécu des aventures fantastiques. C’était une sorte de Kessel ! Moi aussi, j’aspirais à une vie faite d’exotisme, de bravoure, de plaisir et d’inconnu ! Bref, l’adolescence, quoi ! Mais le monde d’aujourd’hui ne s’y prête plus… Aussi, quand je découvris la vie beaucoup moins dissolue d’Hergé qui ne faisait pas moins rêver grands-parents et enfants, j’optais pour cette solution… Et puis de toute façon, à cet âge-là, l’inconnu ; c’est le quotidien… Mais je sens que j’ennuie le lecteur…
Vous pouvez lire la suite sur le site
de Dargaud

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